L’entrée triomphale, le temple et le figuier

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Avant d’examiner le discours du Mont des Oliviers, il est important de considérer les événements qui ont précédé la discussion du Seigneur Jésus avec les disciples, après qu’ils venaient de quitter Jérusalem. La confrontation avec les dirigeants d’Israël et les habitants de Jérusalem est la base de la condamnation du temple, de la ville, de ses représentants et de ses habitants. L’importance de son entrée à Jérusalem et des rencontres qui s’y sont déroulées ne doit pas être minimisée. Elle constitue un contexte important pour tout ce qui va suivre, en particulier au chapitre 24 de ce magnifique évangile. Tels sont les motifs qui sous-tendent les paroles de jugement exprimées par le Seigneur sur la montagne à l`est.

Dans les prochains chapitres, nous examinerons l’impact de son entrée à Jérusalem, son amour pour les habitants de la grande ville et les choses de son Père, ainsi que sa réponse au défi lancé par les chefs religieux, qui a apporté la condamnation finale de ces chefs, du temple, de la ville et des habitants de l’époque. Nous commencerons par examiner l’entrée du Christ à Jérusalem et son interaction avec les habitants de la ville de David, en particulier les chefs d’Israël.

L’ENTRÉE TRIUMPHALE DE JÉSUS EN TANT QUE MESSIE (Matthieu 21:1-11 Marc 11:7-10/Luc 19:35-38)

Au chapitre 21, versets 1 à 11, Matthieu commence cette section importante de son évangile en évoquant l’arrivée du Christ près de Jérusalem, accompagné d’une grande foule. Le Seigneur Jésus a envoyé les disciples chercher une ânesse et un ânon avant son entrée dans la ville sainte. Il s’agit de l’accomplissement d’une prophétie prononcée dans Zacharie 9:9 et Ésaïe 62:11. Nous devrions y prêter une attention particulière, car son accomplissement est vraiment significatif. La citation commence par « dites à la fille de Sion », ce qui implique un message à la ville de Jérusalem, comme à l’époque de Zacharie. Il s’agit d’un appel à la ville de David pour qu’elle se réjouisse de la venue d’un roi « juste et humble » qui « apportera le salut ». Dans Ésaïe comme dans Zacharie, le thème est le salut apporté par le Messie à Jérusalem. Ce roi à venir apporterait sa paix aux nations et une domination qui s’étendrait « d’une mer à l’autre et du fleuve jusqu’aux extrémités de la terre[1] ». En citant cette prophétie était de déclarer que le Messie était finalement venu à Jérusalem avec son royaume. Le temps de l’accomplissement du Royaume de Dieu promis était arrivé à cette génération.

La réaction de ceux qui le suivaient a été de déposer leurs manteaux devant lui. Ceci était similaire à le couronnement du roi Jéhu, où nous lisons que chaque homme prit son vêtement et le plaça sous lui sur les marches nues, et qu’il sonna de la trompette en disant : « Jéhu est roi ! » (2 Rois 9:13). Le fait d’étendre leurs manteaux et leurs branches était un symbole de leur déclaration de la royauté de Jéhu. La foule s’est mise à crier joyeusement en proclamant que Jésus était « Fils de David » et « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ». Cette dernière expression est une citation du Psaume 118:27, un psaume qui, comme nous le dit N.T. France, décrit un pèlerinage joyeux dans le temple, conduit par le roi (celui qui vient au nom du Seigneur)[2]. La foule crie « hosanna », une louange qui signifie « sauve-nous tout de suite ». Le parallèle dans l’évangile de Marc ajoute l’expression « béni soit le royaume de notre père David qui vient » (Marc 11 :10), indiquant que ce n’est pas seulement le roi, le fils de David qui est venu, mais aussi son royaume. La procession tant attendue du Fils de David et de son royaume dans les rues de Jérusalem avait lieu à ce moment-là.

Son entrée à Jérusalem a suscité l’enthousiasme des gens dans les rues. Le texte nous dit que « toute la ville fut émue » et les cris de la proclamation de la venue du Messie ont inquiété les chefs religieux. Une ville sous la domination d’un préfet romain ne se porterait pas bien si un roi venait déclarer sa domination sur elle. Lorsqu’on lui demande qui est celui qui monte sur un âne pour entrer à Jérusalem, la foule le désigne comme « le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée ». Le « prophète » était celui qui représentait Dieu pour leur apporter un message divin et qui, en retour, était investi d’une autorité accordée par Yahvé. Il est venu en tant que prophète comme Moïse (Deutéronome 18:15-19), capable de revendiquer l’autorité de Dieu au-dessus des chefs religieux de Jérusalem.

Un élément important ajouté par l’évangile de Luc est la manière dont il décris la séquence des événements en 19:41-44.

Comme il approchait de la ville, Jésus, en la voyant, pleura sur elle, et dit: Si toi aussi, au moins en ce jour qui t’est donné, tu connaissais les choses qui appartiennent à ta paix! Mais maintenant elles sont cachées à tes yeux. Il viendra sur toi des jours où tes ennemis t’environneront de tranchées, t’enfermeront, et te serreront de toutes parts; ils te détruiront, toi et tes enfants au milieu de toi, et ils ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas connu le temps où tu as été visitée.

Ce passage parle du Christ qui pleure pour la ville en raison de la destruction imminente qui va s’abattre sur elle. Dans Matthieu 24:1, c’est le temple qui est au centre de l’attention en étant démoli, mais dans ce contexte, il parle de la ville et de ses habitants. Remarquez attentivement la déclaration suivante : « Il viendra sur toi des jours où tes ennemis t’environneront de tranchées, t’enfermeront, et te serreront de toutes parts. Plus tard, Luc utilisera un langage similaire pour parler de l’abomination de la désolation et de l’encerclement de Jérusalem par des armées. Il est important de reconnaître que le jugement qui devait s’abattre sur la ville était local et concernait les habitants de Jérusalem à l’époque du Christ, lors de sa première venue. Ce rappel nous aidera à analyser le texte de Matthieu 24 dans son contexte.

LE MESSIE ET LE TEMPLE (Matthieu 21:12-17)

Passons maintenant à Matthieu 21, versets 12 à 17. Le premier arrêt après l’entrée dans la grande ville était le quartier du temple. Il est impossible de minimiser la centralité du temple dans le culte et la vie des Juifs. Il était le symbole de leur identité nationale, surtout après la révolte des Maccabées, qui avait eu lieu environ 200 ans auparavant. C’est le temple construit par Hérode et il surpassait de loin le temple de Salomon en grandeur et en beauté. Les gens venaient de loin pour adorer et admirer ses magnifiques structures. 

La section à laquelle ce passage fait référence semble être liée à la cour païenne où les pèlerins venant de loin pouvaient acheter des animaux pour le sacrifice plutôt que de voyager avec leur sacrifice. Ce lieu se distinguait des zones plus restreintes où seuls les Juifs étaient autorisés à entrer (y compris le temple lui-même). Les animaux étaient vendus pour de l’argent, et les marchands en profitaient. L’indignation du Seigneur s’est abattue sur eux parce qu’ils utilisaient la maison de Dieu comme un lieu de commerce plutôt que comme un lieu de prière. Le problème n’était pas qu’il ne voulait pas qu’ils gagnent de l’argent, mais l’endroit où ils essayaient de faire leur profit. La venue du Messie apporterait l’espoir qu’un jour « il n’y aura plus de marchand dans la maison du Seigneur des armées » (Zacharie 14:21). Le Messie est venu purifier le temple de ses pratiques polluées (Malachie 3:1-4). Le Seigneur a chassé ces vendeurs et a ruiné leurs affaires illégales en renversant leurs tables. Il y a également une connotation de blâme à l’égard des chefs religieux qui ont permis que ces activités à se dérouler dans la cour du temple. Le Messie est venu condamner ce que les chefs religieux avaient permis. Comme nous le verrons, cela a donné lieu à une confrontation d’autorité. Le Seigneur utilise les Écritures comme moyen d’établir ses actions. Le Seigneur cite le texte d’Isaïe 56:7, « Ma maison sera appelée maison de prière », qui était un appel pour les non-Juifs à « s’unir au Seigneur » et à l’adorer. Esaïe envisageait un jour où Dieu accepterait leur culte dans son temple, et où ils appelleraient le centre de ce culte une « maison de prière ». Les marchands et les chefs religieux prenaient les choses à l’envers dans le sens qu’ils transformaient la sainte maison de Yahvé en une caverne de voleurs, un lieu de crime et de vol.

Tout d’un coup, Jésus guérit un aveugle et un boiteux. Nous pourrions nous demander à quoi cela signifie dans le contexte de son entrée dans le temple et sa venue en tant que Messie. Lorsque le roi David s’est emparé de Jérusalem, les Jébusiens lui ont dit qu’il ne devait pas s’y rendre parce que les aveugles et les boiteux le repousseraient. David déclare alors : « Quiconque battra les Jébusiens et atteindra le canal, quiconque frappera ces boiteux et ces aveugles qui sont les ennemis de David… -C’est pourquoi l’on dit: L’aveugle et le boiteux n’entreront point dans la maison.» (2 Samuel 5:6-8). Un homme d’une autorité supérieure à celle de David est venu à Jérusalem et n’a pas condamné les aveugles et les boiteux, mais les a guéris. La réponse à ce miracle a pris la forme d’un chant d’enfants « Hosanna au Fils de David », qui a suscité chez les chefs des prêtres et les scribes un profond « ressentiment ». Le Christ accomplissait les œuvres de Dieu en faisant preuve de miséricorde et de compassion à l’égard des boiteux et des aveugles plutôt qu’en appliquant des rituels cérémoniels[3]. Le premier était vraiment ce qui plaisait à Dieu !

Les chefs juifs indiqent au Seigneur Jésus les cris des enfants pour qu`il dépeindre leurs louanges comme étant mal fondées. La réponse du Christ prend la forme d’une citation du Psaume 8:4. Le contexte de ce passage du psaume est « comment Dieu le créateur fait taire ses ennemis au moyen de la “force” qui sort de la bouche des enfants… »[4]. La louange des enfants était la louange à Dieu pour avoir réduit au silence les chefs religieux dans ses actions. Remarquez qu’alors que le psaume est attribué à Yahvé, les enfants rendent hommage à Jésus.

LE FIGUIER (Matthieu 21:18-22)

Passons maintenant à Matthieu 21, versets 18-22. Le lendemain matin, alors qu’ils se rendaient à la ville, le Seigneur et les disciples passèrent près d’un figuier qui, selon Marc, était « en feuilles », ce qui signifie, bien sûr, qu’il était plein de feuilles. Les fruits n’étaient pas comestibles à cette époque (mars-avril), car ce n’était pas la saison des figues (Marc 11:13).  L’arbre présentait une abondance prometteuse de feuilles, ce qui aurait conduit les gens à croire qu’une grande quantité de fruits allait fleurir, mais les paroles du Seigneur « tu ne donneras plus de fruit » montrent que cet arbre qui se desséchait signifiait qu’il n’avait plus de raison d’être. Comme le souligne D.A. Carson :  Ses feuilles annonçaient qu’il portait du fruit, mais cette annonce était fausse. Jésus, incapable de satisfaire sa faim, non pas parce que l’arbre ne portait pas de fruits, qu’ils soient de saison ou non, mais parce qu’il faisait une démonstration de vie qui promettait des fruits, mais n’en portait pas[5]. Dans les Écritures, le fruit est en grande partie un symbole des œuvres que Dieu exige de son peuple, généralement comme une manifestation de l’essence d’une personne et de sa confiance en Dieu ou en elle-même (Matthieu 7:16-20 ; 12:33). Dans l’Ancien Testament, le figuier était utilisé de manière symbolique de la même façon :

  • Associé au jugement (Isaïe 34:4 ; Jérémie 8:13 ; Osée 9:10, 16-17 ; Joël 1:7)
  • Ceux qui reçoivent la promesse de bénédiction de Dieu sont des fruits mûrs, tandis que ceux qui reçoivent la malédiction sont des figues pourries (Jérémie 24:1-10)[6].

Les disciples sont absolument étonnés de voir ce beau figuier en fleurs se dessécher et se demandent comment il est possible que cet arbre se soit soudainement desséché. Le Seigneur leur enseigne alors que s’ils ont la foi et ne doutent pas, ils peuvent faire non seulement flétrir un figuier, ils peuvent même déplacer cette montagne ! Il est important de noter que la montagne n’était pas n’importe quelle montagne, mais qu’il l’appelle « cette montagne », l’identifiant probablement à la montagne du temple jetée dans la mer ou détruite.

Tout ce qu’ils demanderont au Père dans la prière leur sera accordé, s’ils croient.  Le miracle du dépérissement du figuier est plus qu’un simple appel aux disciples à pratiquer une prière puissante. Il a probablement servi de symbole de ce qui allait arriver à Jérusalem. Contrairement au figuier sans valeur, qui était extérieurement beau mais incapable de produire des fruits comestibles, ils devaient produire des fruits en croyant et en ne doutant pas. Ceci pourrait sembler étrange et que cette réponse ne semble pas être une réponse du tous. Il faut se rappeler que le point essentiel n’est pas tant la « prière » que la « foi » qui produit l’absence de doute. Les fruits de la foi sont l’assurance que nous avons en Dieu et qu’il répondra à nos besoins. Cette foi est puissante et peut même déplacer des montagnes !

Dans l’évangile de Marc, l’histoire est écrite en deux parties, avec la purification du temple entre les deux (Marc 11:12-14, 20-24). Cela démontre l’association entre le dépérissement du figuier et le temple et, en retour, ses rituels. Les deux sont beaux et semblent extérieurement démontrer leur raison d’être, mais les deux sont obsolètes et un jour viendra où le temple sera jugé, tout comme le figuier[7]. Quelque chose de plus grand que le temple est venu et sera rejeté par les chefs religieux sans foi.

Dans notre prochaine partie, nous examinerons la confrontation entre les chefs religieux d’Israël et le Seigneur Jésus dans le temple.


[1] R.T. France note « une tension subtile dans la description que Zacharie fait de ce roi messianique : il est victorieux et pourtant doux, et son triomphe est reçu plutôt que gagné… Il monte un âne plutôt qu’un cheval de guerre et son royaume sera un royaume de paix plutôt que de coercition ». Il monte un âne plutôt qu’un cheval de guerre, et son royaume sera un royaume de paix plutôt que de coercition » (New International Commentary on the New Testament, R.T. France, Eerdmans Publishing Company, 2007, page 777).

[2] New International Commentary on the New Testament, R.T. France, Eerdmans Publishing Company, 2007, Page 780

[3] Nous examinerons plus en détail l’impact de cette situation dans Matthieu 22:41-45.

[4] New International Commentary on the New Testament, R.T. France, Eerdmans Publishing Company, 2007, P.789

[5] The Expositor’s Bible Commentary with New International Version, D.A. Carson, Zondervan, 1995, p. 445

[6] Bien que cela ne soit pas explicite, le Seigneur pourrait exprimer l’accomplissement de Michée 7:1-6.

[7] On a tendance à dissocier le figuier du temple et d’Israël en affirmant que le figuier n’est jamais lié à Israël. Si l’on considère l’association de ce texte avec la purification du temple et le langage du jugement dans Matthieu sur l’Israël infidèle, il serait plus logique d’interpréter ce texte comme le jugement à venir du peuple infidèle qui rompt l’alliance (voir Carson, p. 445).


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